– Fixation du pastel sur papier-calque
– Montage du pastel sur papier-calque
Depuis l’existence du pastel, y compris son âge d’or au 18° siècle, les pastellistes s’évertuent à rechercher un fixatif idéal. Degas se jettera à l’eau, ce qui est le cas de le dire, puisqu’il fera des expériences de fixation en travaillant le pastel humecté à la brosse ou en aspergeant par endroit l’œuvre au pastel d’eau bouillante ! Mais l’eau n’a jamais vraiment fixé le pastel !
Les expérimentations pour une bonne adhérence du pastel au support, Degas les multipliera. Par exemple pour faire pénétrer la couleur dans le support, il n’hésite pas à l’occasion à rainurer chaque couche de pastel pour que la poudre irradie dans les interstices. Il va même jusqu’à brûler la surface du pastel pour mieux la lier à la couche inférieure. Les brûlures parviennent à faire de beaux effets sur les couleurs de certains pastels mais en revanche froissent le support et y font facilement des trous.
Refusant d’employer des adhésifs du commerce, Degas confectionne ses propres fixatifs. Il utilise notamment un fixatif à base de caséine qui semble assez efficace (la caséine du lait est utilisée comme liant de peinture) ou un autre à base de colle de poisson. (colle souple utilisée en marqueterie) Il fait aussi des mélanges, par exemple ajout de résine à la caséine. Mais le fixatif le plus satisfaisant est à base de résine. La composition de ce produit, qui lui est confiée par un ami, Luigi Chialiva, reste encore secrète de nos jours… Toute information à ce sujet est ici bienvenue !
Le fixatif est le matériau indispensable à l’alchimie des fusains et pastels sur calque, support lisse et de surcroît fragile. Degas utilise le fixatif de façon intermittente pour isoler les couches de pastel, superposées et juxtaposées, et ainsi prévenir le barbouillage inhérent aux mélange des couleurs.
De plus, une surface fixée lui est nécessaire pour retravailler par-dessus une œuvre ancienne, selon son habitude. Chaque couche fixée forme une surface rêche, propice à l’adhérence de la nouvelle couche de pastel.
Degas commence l’œuvre par un dessin au fusain qui servira de base au pastel. Le fusain sur calque est fixé pour stabiliser la poudre cendreuse. Un dessin au fusain non fixé se dégrade rapidement s’il est manipulé. En tant que matrice des pastels de Degas, le fusain est la charpente de l’œuvre et se doit d’être stable car on en retrouvera les lignes dans le pastel définitif et des traces dans la texture des ombres et des couleurs.
Par ailleurs, Degas fait usage du fixatif comme d’un médium, c’est à dire un liant pour obtenir des matières et des effets nouveaux.
Sous fixatif, les couches de pastel prennent une sorte de patine, comme si une vague de couleur liée par le liquide résineux du fixatif venait recouvrir une autre vague. Chaque fine pellicule de pigments fixés devient translucide comme l’ambre et, en superposition, laisse transparaître la mémoire de la couche inférieure, laissant deviner la vie sous-jacente.
Degas vernit l’avant dernière couche du dessin avec un fixatif puis termine par une couche de pastel non fixée pour conserver la fleur du pastel. Le poudroiement ultime adhère bien à la couche du dessous devenue un peu rugueuse sous l’effet de la fixation.
Des contrastes de matière sont obtenus avec le pastel non fixé conservant sa matité naturelle, et le pastel fixé d’un jet vif par endroit pour provoquer une zone brillante.
Le fixatif affine la couche de pastel, donne un lustre aux chatoyantes zébrures de pastel des couches superposées, elles-mêmes bénéficiant de la surface translucide du calque, tout ce processus rappelle probablement à Degas les glacis qu’il admire tant dans la peinture à l’huile.
Toutefois, les supports des œuvres aux multiples couches se sont flétris. Les effets conjugués de la colle utilisée au montage, et du fixatif ou des fixatifs de qualité différente, recouvrant la même œuvre au pastel, ont à la longue assombri les tonalités des pastels sur calque et altéré bien des couleurs, éclatantes à l’origine.
Mais si les pastels se sont assombris dans le temps, ils perpétuent en quelque sorte le tempérament angoissé de Degas ! Quant à la nature intrinsèque de l’art, n’est-elle pas de se dégrader, tout comme la vie ?
Montage du pastel sur papier-calque
L’œuvre sur calque, fusain rehaussé de pastel ou fusain complètement pastellé, est montée sur un support rigide. Le calque principal et les ajouts de papier-calque sont collés ensemble sur le support.
Un colleur professionnel assiste quelquefois Degas. L’opération est délicate et des bulles d’air peuvent rester coincées sous le calque.
Là aussi, tout comme pour le fixatif, il est difficile de préciser la qualité de la colle utilisée par Degas. Hypothèses : colles de poisson, de peau de lapin, colle à la caséine, résine ?
Pour compenser l’altération du calque à la lumière, le calque de l’époque ayant tendance à jaunir et à foncer, le pastel est d’abord collé sur papier blanc pour donner de l’éclat, lui-même fixé sur carton épais ou sur panneau.
Le montage sous adhésif est une façon non seulement d’aplanir et de consolider le calque mais aussi de faire bénéficier les pigments, humectés par l’encollage, d’un supplément de fixation.
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